L'ASSOMMOIR (1877)  

 

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Les Rougon-Macquart doivent se composer d'une vingtaine de romans. Depuis 1869, le plan général est arrêté, et je le suis avec une rigueur extrême. L'Assommoir est venu à son heure, je l'ai écrit, comme j'écrirai les autres, sans me déranger une seconde de ma ligne droite. C'est ce qui fait ma force. J'ai un but auquel je vais.

Lorsque l'Assommoir a paru dans un journal, il a été attaqué avec une brutalité sans exemple, dénoncé, chargé de tous les crimes. Est-il bien nécessaire d'expliquer ici, en quelques lignes, mes intentions d'écrivain ? J'ai voulu peindre la déchéance fatale d'une famille ouvrière, dans le milieu empesté de nos faubourgs. Au bout de l'ivrognerie et de la fainéantise, il y a le relâchement des liens de la famille, les ordures de la promiscuité, l'oubli progressif des sentiments honnêtes, puis comme dénouement la honte et la mort. C'est la morale en action, simplement.

L'Assommoir est à coup sûr le plus chaste de mes livres. Souvent j'ai dû toucher à des plaies autrement épouvantables. La forme seule a effaré. On s'est fâché contre les mots. Mon crime est d'avoir eu la curiosité littéraire de ramasser et de couler dans un moule très travaillé la langue du peuple ! Ah ! la forme, là est le grand crime ! Des dictionnaires de cette langue existent pourtant, des lettrés l'étudient et jouissent de sa verdeur, de l'imprévue et de la force de ses images. Elle est un régal pour les grammairiens fureteurs. N'importe, personne n'a entrevu que ma volonté était de faire un travail purement philologique, que je crois d'un vif intérêt historique et social.

Je ne me défends pas, d'ailleurs. Mon œuvre me défendra. C'est une œuvre de vérité, le premier roman sur le peuple, qui ne mente pas et qui ait l'odeur du peuple. Et il ne faut point conclure que le peuple tout entier est mauvais, car mes personnages ne sont pas mauvais, ils ne sont qu'ignorants et gâtés par le milieu de rude besogne et de misère où ils vivent. Seulement, il faudrait lire mes romans, les comprendre, voir nettement leur ensemble, avant de porter les jugements tout faits, grotesques et odieux, qui circulent sur ma personne et sur mes œuvres. Ah ! si l'on savait combien mes amis s'égayent de la légende stupéfiante dont on amuse la foule ! si l'on savait combien le buveur de sang, le romancier féroce, est un digne bourgeois, un homme d'étude et d'art, vivant sagement dans son coin, et dont l'unique ambition est de laisser une œuvre aussi large et aussi vivante qu'il pourra ! je ne démens aucun conte, je travaille, je m'en remets au temps et à la bonne foi publique pour me découvrir enfin sous l'amas des sottises entassées.

Emile Zola - Paris, 01 janvier 1877

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L'Assommoir peut se résumer en une phrase : Fermez les cabarets, ouvrez les écoles. L'ivrognerie dévore les peuples.

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RESUME DU ROMAN

Gervaise, accompagnée de ses deux fils, a suivi son amant Auguste Lantier jusque Paris en laissant derrière elle sa vie à Plassans. Très vite, elle est abandonnée par Lantier et se retrouve dans une situation très précaire. Elle trouve alors un emploi de blanchisseuse : cela lui permet de sortir de sa misère. Elle formule alors un rêve : être simplement heureuse. C'est alors que Coupeau, un zingueur, décide de la courtiser. Gervaise finit par l'épouser malgré quelques craintes.

Le nouveau couple connaît une certaine prospérité grâce à des économies draconiennes et s'agrandit avec l'arrivée d'une petite fille : Anna surnommée Nana. Gervaise commence à entrevoir son rêve de toujours : avoir sa propre blanchisserie. Malheureusement, un accident vient briser ce rêve : Coupeau chute d'un toit et se casse une jambe. Gervaise le fait ramener chez elle, décide de le soigner et pour cela puise dans ses économies.

Ayant pratiquement abandonner son rêve, Gervaise retrouve l'espoir grâce à son voisin, Goujet, qui lui prête l'argent nécessaire à l'achat du magasin. Celui-ci aura comme enseigne Blanchisseuse de fin.

Gervaise est heureuse et fait prospérer sa blanchisserie, elle engage même deux femmes pour pouvoir répondre à la demande qui ne fait qu'augmenter. Cependant derrière ce bonheur apparent se cache un danger : Coupeau, devenu infirme, est gagné peu à peu par la paresse et surtout par l'alcool. En effet il passe la plus grande partie de son temps à l'Assommoir, le bar du quartier. Gervaise ferme les yeux sur le comportement de son mari et doucement glisse vers un certain laxisme. Se négligeant, elle laisse couler son commerce et est abandonnée de tous sauf de Goujet. Son malheur et sa déchéance s'accentuent avec le retour de Lantier.

L'ancien amant se lie d'amitié avec le mari et, ensembles, ils vont dans les bars. Un soir Coupeau ramène Lantier chez lui. Très vite ce dernier reprend son emprise sur Gervaise avec la bénédiction du mari. Chaque jour qui passe, Gervaise s'enfonce de plus en plus dans la déchéance. : elle néglige son magasin, accumule les dettes et perd son dernier ami Goujet. Bientôt c'est au tour de Nana de fuir.

Gervaise gagnée par l'alcoolisme est devenue bouffie et sale. Le coup de grâce lui est donné par une de ses anciennes employées : Virginie. Cette dernière ayant rachetée la blanchisserie accepte de prendre Gervaise qui doit laver le sol, tout cela sous le regard de Lantier, devenu l'amant de Virginie.

Devenu fou, Coupeau meurt et Gervaise se fait expulser de sa chambre. N'ayant plus rien, elle décide de vendre son corps mais personne n'en veut. Elle finit par mourir, abandonnée de tous, dans sa dernière demeure : une niche sous un escalier.